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vendredi 1 février 2019

L'Esprit de la couleur

 Cet article, sur les coloristes, très intéressant (malgré un erreur faite en estimant qu'il n'y a pas de grands coloristes us) m'a fait réfléchir un peu
Que la couleur ait une grande importance dans la BD c'est une évidence même (surtout?) pour ceux, qui , comme moi sont plus sensibles au noir et blanc

Un exemple avec THE géant
J'ai trouvé cette illue, qui me "dérangeait", puis j'ai compris que c'était parce que j'ai toujours connu cette autre version, au dessin différent (Eisner faisait souvent des "recreations" pour des rééditions, de ses couv)
L'ambiance est totalement changée, déjà du simple fait de la nouvelle couleur
 
 Ceci est une repro en niveau de gris de la mise en couleur d'une couv du Spirit
 Colo par ...Richard Corben
En dessous de la Corben vous avez la version 100% Eisner, qui a ma préférence mais le but n'est pas là, il est de montrer à quel point une technique modifie la sensation du lecteur. Corben est sur de l’aérographe. Eisner non
 
 
Je crois que la colo/peinture de cette couv est de Ken Steacy. Quelle différence quand de simples aplats sont juste appliqués sur le trait (bien sur il y a aussi des modif de dessin)
 
Quand il ne se chargeait pas lui même de la mise en couleur je trouve que souvent le coloriste, s'il utilisait de la peinture, figeait le dessin
 
 Pour celle ci je n'ai pas de seconde version, juste le plaisir de comparer le noir et blanc avec la couleur
 
 Et là vous avez une magnifique double couv...
 sa vf...
 le rough...
 une autre recherche...
 et un hommage par Walthéry
 Ayant ouvert avec l'une de mes (nombreuses) couv préférées, je termine avec celle (que j'ai perdu !) qui est restée des années scotchée sur ma porte de chambre d'ado
Il s'agit d'un poster, qui a eu droit à une recoloration, très réussie, de la couv du mag d’origine

sa version en noir et blanc
 
Eisner fait partie des très rares (le seul?) artistes dont j’apprécie autant la couleur que le trait (au moins sur les illues/couv)

10 commentaires:

Laurent Lefeuvre a dit…

Quel pied de découvrir/redécouvrir ces multiples versions !
Tu as gardé le meilleur pour la fin.

Philippe Cordier a dit…

pour moi aussi mais j'ai tellement usé mes yeux sur ce poster que je peux manquer d'objectivité

Mysterycomics-rdb.blogspot.fr a dit…

Comme je sais que tu as lu le petit extra que j'avais rédigé sur la colorisation pour la critique de "Charlotte impératrice" de Nury et Bonhomme, je ne vais pas me répéter. Même si mes remarques concernaient en vérité plus la commercialisation d'albums en n&b à ds prix faramineux qu'une attaque en règle contre le n&b (j'aurais mauvaise grâce d'attaquer le n&b car j'ai toujours dessiné ainsi et mes artistes préférés sont tous excellents dans ce registre).

Ma conviction est simple cependant : quand une BD est conçue pour être colorisée, alors son exploitation parallèle en n&b me paraît artificielle. Mais, dans le même temps, je défends le n&b comme exercice car un dessin qui fonctionne doit fonctionner en n&b. Donc il ne faut pas se reposer sur la couleur. Mais il ne faut pas non plus la négliger. La couleur, ça peut être comme la musique pour un film, une addition incroyable, qui bonifie le dessin, l'histoire.

Je n'aime pas les coloristes qui en rajoutent jusqu'à, parfois, masquer le trait, bouffer l'encrage (genre Dean White par ex). Il faut savoir doser et que le dessinateur soit sur la même longueur d'ondes que son coloriste. Sinon c'est comme recouvrir une oeuvre.

Le cas d'Eisner est un peu tendancieux car c'était un artiste (un génie) du n&b. La couleur était juste là pour rendre son travail plus attractif, les lecteurs appréciant davantage le dessin en couleurs que le dessin en n&b. Tout est question d'objectif encore une fois : si l'artiste dessine sans penser à la couleur, sans en vouloir, alors il n'en faut pas. C'est simple.
Mais enlever la couleur juste pour séduire des puristes, c'est méprisant pour les coloristes. Quand Urban a publié une version de "Batman : Year One" sans les couleurs (extraordinaires) de Richmond Lemwis, ça m'a fait bondir - et je doute que Mazz' ait apprécié qu'on ôte la contribution de sa partenaire. C'est n'importe quoi, ça enlève une part importante de l'indentité graphique de l'oeuvre.
En revanche, ajouter de la couleur à Pratt, Eisner, Watterson... C'est inutile, superflu. C'étaient des dessinateurs de n&b, leurs planches vivent, respirent en fonction de l'absence de couleurs, leurs ambiances existent par l'absence de couleurs. C'est comme se teindre les cheveux en espérant rajeunir. Une aberration.

Philippe Cordier a dit…

Je reste en désaccord sur un point important : voir le noir et blanc d'une grande oeuvre, même pensée pour la couleur, n'est pas qu'un plaisir de plaisir de puristes (et quand bien même!) Ce devrait être un plalsir de tout curieux de l'oeuvre
Quand je vois l'esquisse d'un peinte je suis ravi, alors que, forcément, l'artiste ne souhaitait pas que ce soit vu en l'état
Pour year One en n et b, c'est une excellente chose; L'oeuvre finie est en couleurs; Splendides couleurs. Voir le n et b permet de voir la force du trait ET le travail génial de la coloriste; Pour moi c'est le contraire que de manquer de respect à la coloriste
Et pour l'anecdote les couleurs de Born Again, pour vintage qu'elles soient, sont très bonnes, et en partie par Richmond Lewis; or c'est Mazzucchelli qui a fourni les planches n et b pour faire un artist edition. Donc il le voulait, et je doute qu'il souhaitait par là même manquer de respect à sa femme
Nos positions sont inconciliables sur ce point...mais ce n'est pas bien grave

Plumoc a dit…

Je suis d'accord avec RDB sur la plupart des points,c'est bien vu,d'autant que je suis de plus en plus allergique à l'outil numérique pour la colo,qui n'est qu'un outil bien sûr.C'est pourquoi j'aime beaucoup son "Sinon c'est comme recouvrir une oeuvre".
En revanche je trouve intéressant tout ce qui fait vivre une grande oeuvre,quitte à la bousculer,du moment que ma version de prédilection reste disponible.

Après,concernant Eisner,à côté de l'artiste j'ai plus de mal avec l'homme d'affaire et son pendant,le communicant,qu'il a été aussi.Surtout avec "l'héritage"qui en a découlé dont on constate les dégâts aujourd'hui.Du pain béni pour toute une clique de "mieux que les autres"à la connaissance du médium BD assez approximative.En BD plus que jamais désormais,populaire est devenu une insulte,à laquelle il faut remédier. Ça passe pas,là Je grince.

Au delà, et pour en revenir au sujet,Eisner m'a rarement convaincu à la couleur,j'y vois un côté artificiel,frontal,un manque d'harmonie,pour moi ce n'est pas totalement son truc.C'est mon ressenti.

La première image me gêne, j'y vois une tête coupée sur l'eau,il me manque des ombres sous l'eau pour donner du poids au corps,un sillage plus consistant pour induire un mouvement,une fuite.

Je préfère ensuite la colo version Corben, qui met l'emphase sur le Spirit,les rails et la loco.Ainsi que les petit persos dessous.C'est clair,net,en tension,que l'action suppose.
Eisner donne plus de poids à la ville,il dilue,change l'heure de la scène...Moins efficace pour moi si on part du principe que c'est la même intention.

Mais bon,peut être que j'aime trop son coup de pinceau...à l'encre.:-)


Belle dernière image ,cependant.Dans toutes les versions.

Philippe Cordier a dit…

je suis un grand grand admirateur du n et b Eisnerien bien sur, mais je trouve son approche (commercialement "obligée je suis d'accord) de la couleur très personnelle, sans compromis, et passionnante; J'ai en tête le "fouillis" apparent de l'appel de l'espace, qui m'a conquis en couleur ET en n et b
je suis bien évidmment d'accord avec rdb et toi sur "recouvrir un oeuvre...", surtout si on cite Pratt, mais je regrette et je persiste : voir autre chose que la version finie est une mereveille (d'ailleurs c'est aussi ce que tu dis..tant que l'oeuvre voulue est dispo!)
Pour Eisner le commercial, au début je tiquais un peu aussi, avec le côté, dans ma tête en construction "un artiste devrait ne pas se soucier de ça..." qui en fait était idiot de ma part maintenant que je vois un peu plus les coulisses de la création et le quotidien des artistes
Que le fait qu'Eisner est beaucoup appuyé sur "la bd peut être de l'art..." et qu'il aille jusqu'à récupérer la notion de "graphic novel", bien sur que ça a fait du mal puisque aujourd'hui il ya du prout prout plein les linéaires avec "ce n'est pas de la bd, c'est du roman graphique" qui m'horripile, mais il faut se remettre dans le contexte et il était nécessaire, vraiment nécessaire, que qqun fasse ce boulot pour changer un peu les mentalités
Sans compter que même s'il poussait au cul pour qu'on prenne enfin la bd au sérieux, dans les faits il ne faisait pas des livres pompeux pour élites, il faisait de la vraie bd populaire. Et je ne parle pas juste du Spirit, car tous ses livres post Contract with God, tous, sont des merveilles de livres populaires au sens noble du terme

Plumoc a dit…

Je n'ai jamais eu aucun problème avec le fait qu'un artiste cherche a gagner sa vie,surtout dans le pas toujours glorieux monde des comics,et tous ses drames humains difficilement admissibles.Donc OK pour moi de ce côté,on est d'accord.

Ma gêne,c'est quand Eisner l'artiste s'est laissé déborder par Eisner le communicant au service de l'homme d'affaire.Faute de mieux puisqu'il était tricard dans le milieu après une longue parenthèse, et quasiment ringardisé par les Kirby,Kubert,Buscema,Adams...... qui brillaient de mille feux.

Eisner le communicant qui, un oeil rivé sur les librairies généralistes, s'est mis a,comme tu le dis:" beaucoup appuyer (sur la tête des autres ?,ces faiseurs?, et sur les comics en général seulement remplis d'histoires de vengeances et de courses poursuites sans intérêt.Insinuant que lui......) pour insister sur le fait que"la bd peut être de l'art..."(aux yeux de qui,ceux qui fréquentent les librairies généralistes et qui méprisent la BD,qui n'attendaient que ce genre de discours et qu'on leurs serve la soupe pour ouvrir leurs porte-monnaie ?).Rien à faire ça passe pas.

Pour moi,pour défendre plus un intérêt propre -et construire sa statue- qu'un intérêt général,Eisner s'est montré inconséquent.

A mes yeux ça reste une tache dans son parcours.

Tiens,je préfère regarder ses couvs et illus du Spirit-en noir et blanc:-))))

Philippe Cordier a dit…

moui, il a oeuvré à sa propre glore ok, et oui je fus un poil agacé par son dénigrement assez systématique du super héros mainstream...mais je suis persuadé que, lorsqu'il a commencé ce "lobbying" pour ce qui deviendra le graphic novel (1978 quand même ne l'oublions pas) c'était totalement nécessaire
Si des conséquences furent bof bof, sur l elong terme (pour une pesudo élite à venir) il a apporté plus de bienfaits par cette légitimation d'un genre déconsidéré

Philippe Cordier a dit…

et je retourne regarder ses couv et illus du Spirit en couleurs :)

Plumoc a dit…

Bien sûr Eisner,l'artiste ,reste un très grand.
Je garde en tête, dans ma bibliothèque-mémoire,parmi d' autres artistes ,quelques dessins de son cru dont je ne me lasse pas.