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dimanche 20 novembre 2022

Poésie, et plus

 

Poésie?! La poésie et moi ça fait 4

Pourtant, de temps en temps je suis touché par un trait, une idée, une approche

Ce fut le cas régulièrement avec Franquin, ce génie qui savait amuser, toucher, faire réagir...

La première fois fut sans doute, ado, celle ci



L'image d'ouverture de cette entrée est la "réédition" tant attendue (36 ans) de ce livre magique, avec Numa Sadoul



Il semblerait que la fille d'André Franquin soit pour beaucoup dans les délais, les remaniements, changement d'éditeur et, surtout, modification profonde de l'iconographie

L'actuelle, propre sur elle, a bien peu de saveur

Il y a des pages, des images intéressantes, mais beaucoup de ...


L'original était un joyeux bordel, mais blindé de merveilles graphiques non reprises aujourd'hui



Ado encore, je l'ai eu en main, de la bibliothèque. Comme avec la version Aedena de Dark Knight il ne m'est pas venu à l'idée de le "voler ou de le perdre et le payer" (une éducation trop rigide :) 

J'ai fait des photocopies, perdues depuis longtemps

Reste que les textes des entretiens, a priori non retouchés, sont là et que sa lecture est un énorme plaisir (j'en suis à peu près à la moitié) Dire que de ce que j'ai pu entendre/lire la fille de ce génie s'opposait à une réédition en partie car son père, selon elle, parlait trop de sa déprime (ce mot vient souvent en lieu et place de "dépression" d'aileurs) Et bien si elle avait caviardé les parties qui évoquent, même à demi mot, ce mal être, il ne serait pas resté grand chose de la première partie du livre

Quel talent inversement proportionnel à la prétention! (une humilité bien appuyée par la pathologie également)


Un autre poète, en lien assez direct en terme d'influence, avec Franquin


J'ai croisé quelques fois à St Malo le très sympathique Gégé mais ne connaissais pas son travail

Influencé par Laurent (Lefeuvre) et le travail de Komics Initiative j'ai participé à la compagne de cette réédition et ne le regrette pas une seconde

De la poésie moderne, malgré les années, et un trait doux, rond

Intemporel



On peut, forcément, penser à Franquin, mais aussi à un autre géant (et un autre André) disparu, Geerts

J'ai été personnellement touché par une histoire dont voici une seule case


De l'onirisme toujours, et une autre forme de grâce : le recueil, chez Black and White (une création récente cette fois) des planches de Cécil sur son confinement et son introspection artistique en live

Il résume son projet ici




C'est atypique, assez dur à résumer, avec des séquences hors du temps, d'autres plus terre à terre, des rencontres, des idoles, des influences...un très beau et long voyage créatif


L'auteur et son éditeur, Mr Raphael Wacker



J'ai pu suivre ce projet (que j'imagine dispo hors campagne sous peu, chez B&W), faire des relectures, des petites impressions. retours, et quelle surprise de voir sur mon exemplaire que Raph n'est pas le seul croqué à la façon Cécil

Géant


J'ai ouvert avec un génie, je ferme avec un autre, en quittant, et oh combien, la poésie (sur le fond car sur la forme il y en a)

Sans Bofa pas de Tardi, voire pas d'Hergé, ou de Morris...

Un illustrateur hors norme, incroyable

Je connais beaucoup d'images de Bofa, du net, mais n'avais pas de livres de lui jusqu'à cette magnifique réédition récente chez Cornélius


C'est époustouflant, d'une noirceur insondable, de la désillusion, de l'analyse beaucoup de clairvoyance et, malheureusement, d'actualité

Le récit, de Bofa également, est de 1937 

Brisé par la première guerre mondiale il voyait arriver la seconde, ce qui ne risquait pas d'améliorer sa vision du monde et de l'être humain


Son dessin est léger, profond, aérien, pesant, noir, lumineux, gris, poétique, plombant, superbe...

Un incontournable absolu

Si je lui préfère Mort à Crédit (quelle claque stylistique) Le Voyage au bout de la Nuit, de Céline,m'a fait, un peu, la même impression, le même choc, que la lecture de ce livre de Gus Bofa


Gus Bofa a tout dit :


9 commentaires:

Laurent Lefeuvre a dit…

Hello !

Alors je suis très déçu d'apprendre que la nouvelle maquette de "Et Franquin créa Lagaffe" (à chaque fois... j'ai envie d'écrire "Et DIEU créa Lagaffe", tant ça semble couler de source !) ait perdu l'essentiel de ce qui faisait la magie de ce Graal...

... Et je suis dans la minute suivante tout ragaillardi (et touché) car tu cites Monsieur Tendre de Gégé juste en dessous !

Évidemment, il serait le premier à en rougir, à dire combien Franquin et lui ne jouent pas dans la même catégorie, qu'il est lui-même un amoureux éperdu du travail de Franquin, et du bonhomme depuis ses débuts dans la BD (dans Spirou) il y a bientôt 50 ans (!).

Mais il y a cette filiation spirituelle évidente, cette gentillesse, cette attention à la bie, aux gens, et aussi, en effet, à la poésie telle que pratiquée par Mordillo, Sempé, Tati, ou plus acide, par Desproges.

Gégé a connu Franquin (c'est lui qui, à la vue de la première page de Monsieur Tendre en 1979 dans une brasserie de Bruxelles : "Il FAUT publier ça !), était ami avec le regretté Mordillo, a croisé Desproges (au Tribunal des Flagrants Délires) et tant d'autres (Uderzo).

Bref, MERCI pour lui !


(Monsieur Tendre paraîtra en librairie début 2023).

Laurent Lefeuvre a dit…

C'est très juste ce que dit Lionel.

Comme si la BD devait encore s'excuser d'être constituée... de dessins !

Philippe Cordier a dit…

carrément,
les deux livres sont aux antipodes absolus l'un de l'autre de ce côté : froid/clinique/pedago contre foisonnant/délirant/jouissif

jarvis69 a dit…

Une partie des bandes enregistrées des entretiens de Franquin et Sadoul sont disponibles ici :https://www.rtbf.be/article/franquin-genie-de-la-bd-se-raconte-dans-un-podcast-inedit-en-6-episodes-10930866?fbclid=IwAR2OvAChQIExXd8aqJ_c1Cf7z6vQRZaVdys0CqyzWpYvhaeVppNFVuc2qwo

Philippe Cordier a dit…

Ton lien ne semble pas fonctionner mais Jimmyraker avait donné celui ci, que je me suis mis de côté
https://www.rtbf.be/article/franquin-genie-de-la-bd-se-raconte-dans-un-podcast-inedit-en-6-episodes-10930866

Philippe Cordier a dit…

Une itw de Sadoul éclaire diplomatiquement les "soucis" de maquette/icono, et plus

D.C. : Où sont passées les illustrations jouissives d’André Franquin, où il se représentait lui-même pour fustiger votre curiosité ?
N.S. : Cela fait 36 ans que je rêvais de voir ce livre réédité. Mais je n’ai pas eu voix au chapitre sur la maquette, qui nous a été remise clef-sur-porte, pas plus que sur le choix des illustrations. La ligne d’Isabelle Franquin s’est inscrite dans la volonté d’aller vers davantage de sagesse et de clarté, ce qui donne effectivement un bouquin plus sérieux. Sa volonté était d’illustrer toutes les œuvres citées par André Franquin dans les entretiens, comme Les Oraisons funèbres de Bossuet ou la Femme à sa toilette de Jan Steens. Et pour ce qui concerne l’art de Franquin proprement dit, il s’agissait de puiser « basiquement » dans les dessins dont les droits n’appartenaient pas à Dupuis. Les coulisses de cette réédition ont été parfois compliquées à vivre.

D.C. : Le texte original a aussi été retouché. Pourquoi les interactions avec l’épouse d’André Franquin, Liliane, ont-elles disparu ?
N.S. : Toutes les interventions et les témoignages qui n’étaient pas de la bouche d’André Franquin ont été ôtés. Ce n’était pas ma volonté mais il fallait resserrer le propos sur Franquin. Les compléments ont été par ailleurs refusés par l’ayant droit dans un souci de cohérence éditoriale. Après la publication du livre, j’avais continué d’interviewer André Franquin jusqu’à sa mort, en 1997. Il y avait des mises à jour potentiellement intéressantes à ajouter dans cette réédition. Pour de mystérieuses raisons, j’ai appris, au dernier moment, que ce n’était pas possible. Mais je suis tout de même heureux que ce livre existe. Au final, l’essentiel est que l’on n’a touché à aucune parole d’André Franquin lui-même.

D.C. : Il pouvait être noir et dépressif, tout autant que drôle et haut en couleur. Qui était réellement André Franquin ?
N.S. : Il se décrivait lui-même comme un homme dépressif mais, derrière la déprime, le gag n’était jamais loin. Dans les compléments d’interviews non publiés, je lui reparlais de sa dépression. Il s’interrogeait encore là-dessus. Mais même quand il se dépréciait, c’était toujours avec un clin d’œil humoristique derrière. Il ne déprimait jamais en public. C’était un solitaire qui adorait rire en société.

Paul Raffy a dit…

Tout ça ne fait que me conforter dans l'idée que je vais finalement me contenter de ma pauvre version pdf de l'édition originale.
Elle est surement bordélique, mais elle est aussi foisonnante d'humour, pleine de drôlerie et, même, irrévérencieuse. Enfin VIVANTE, complètement dans l'esprit de son sujet, cet immense génie.

Philippe Cordier a dit…

J'ajoute que les bandes sont une jubilation totale. J'en ai écoute un tiers et c'est un régal

Thierry Martin a dit…

Oui les bandes sont merveilleuses et émouvantes a écouter aujourd'hui !


Mais comment ça me parle tout ça...
et l’épisode avec Gotilb sur les idées noires et Fluide à partir de 11 mns 45 m'a particulièrement fait sourire!