Rechercher dans ce blog

mercredi 11 avril 2018

Splash page

 Lorsque Klaus Janson m'a envoyé ce magnifique dessin, pour la couv d'un numéro de Scarce rendant hommage à Will Eisner pour sa disparition, il y a déjà 13 ans, je me souviens qu'il m'avait écrit quelque chose comme "je voulais montrer la réaction du Spirit apprenant la mort de son créateur de la bouche de la fille de Dolan".
 Il a donc raconté une histoire en une seule image. 
Et c'est précisément ce que faisait Eisner, dès les années 40, avec ce qu'il a popularisé : la splash page. Une pleine page ouvrant une histoire. On lui a souvent demandé d'où venaient ces idées géniales de première pleine page du Spirit racontant tant de choses : de la contrainte répondait-il. Il n'avait que quelques pages (7 en général) pour son histoire. Il n'allait pas en gâcher une avec une page titre ne racontant rien.
Il en a souvent mis plein la vue avec ces splash
 Parfois il démarrait carrément son histoire, avec cases et bulles
 Il jouait avec des fonds qui, à leur manière, donnaient déjà plein d'infos au lecteur
 
 Assez régulièrement il y avait une grande image, impressionnante et posant le décor, avec des infos en colonne à côté
 
 Il utilisait aussi de temps en temps cette place "juste" pour poser une ambiance, et accrocher le lecteur
 Des astuces brillantes lui permettaient également d'aller plus vite, techniquement
 Celle ci est magistrale de part sa "simplicité" et son exécution
 En plus d’être un narrateur hors du commun Eisner était aussi un virtuose du dessin, alors il y a des splashs qui sont tout simplement des merveilles de dessin
 Et pour finir en dessin, n'est-il pas beau ce Spirit made in Thierry Martin!?!!

4 commentaires:

RDB a dit…

Quel génie !

Et c'est marrant de se poser là-dessus parce qu'en ce moment, j'observe de la part de certains auteurs de comics un retour à ce type de narration directe, ou en tout cas qui cherche à maximiser le format, la pagination dont ils disposent pour densifier leur récit. Cela ne va pas toujours aussi loin que Eisner, dont la maestria est redoutable, l'inventivité sans fin, mais c'est évident.

Deux exemples : Jeff Lemire, un scénariste très productif actuellement (il travaille pour Marvel, DC, Image, Dark Horse, Valiant !). Dans une de ses séries ("The Terrifics" chez DC), il a expliqué en itw vouloir revenir à une narration telle qu'en usage durant le "silver age", avec des épisodes complets, des chapitres qui proposaient une avancée réelle chaque mois, qu'on puisse apprécier à l'unité puis ensuite une fois réunis en recueil. Et c'est très pêchu, presque déstabilisant car on en a perdu l'habitude.

Et Mark Waid-Chris Samnee sur "Captain America" (dont le #700 vient de sortir, le dernier co-écrit et dessiné par Samnee). Tout leur run est frappant par l'énergie qui l'anime, comme s'ils avaient réalisé chaque épisode comme leur dernier (sur le titre, pour Marvel). Du coup, on se retrouve avec des histoires éclair où exposition-action-conclusion sont ramassées en vingt pages, comme un sprint, sans pourtant que cela soit bâclé ou hâtif, mais sans non plus coller aux standards de la narration décompressée, où on prend son temps pour poser les problèmes, explorer les relations des personnages, etc. Ici, pas/plus de temps à perdre, le temps semble compté, l'urgence domine, on va à l'essentiel, c'est vite lu et en même temps on en sort essoufflé, on retient parfaitement l'histoire d'un mois à l'autre.

Très tonique et rafraîchissant. Bien entendu, faire ça en vingt pages au lieu de 7-8, c'est presque du luxe, mais ça indique une volonté de dynamiser (dynamiter ?) le récit.

Philippe Cordier a dit…

très intéressant ce que tu dis là, pour quelqu'un comme moi un peu loin de l'actu
Ca va carrément dans le bon sens, et ça prouve que ce genre de préférences narratives, que nous sommes nombreux à partager ici, n'est pas juste lié à une nostalgie de vieux geeks à la "c'était mieux avant"; Il s'agit d'un choix narratif intelligent, jouant sur le support, comme tu le dis, autant du single que de l'inévitable tpb
Il y a donc de l’espoir dans l'approche du medium (pas que dans le dessin, ça on le savait déjà, il y a plein de talents dans ce domaine)

artemus dada a dit…

Je ne voudrais pas doucher ton enthousiasme, Phil, à la lecture des propos de l'ami RDB au sujet de Jeff Lemire (et d'un renouveau scénaristique) mais, comme le disait fort justement Yogi Berra : "En théorie il n'y a pas de différence entre la pratique et la théorie, en pratique si !". Pour avoir lu le premier épisode des "Terrifics", d'une vacuité abyssale, et certains de ces derniers travaux (qui seront aussi mes derniers, à la manière dont Lemire écrit ses scénarios), il y a loin de la coupe aux lèvres.
Soit les indications de Jeff Lemire ne sont pas assez précises, soit les dessinateurs avec qui il travaille ne suivent pas ses consignes ; mais je n'ai rien de lui qui soit déstabilisant à cause de la densité de ses histoires. C'est même plutôt le contraire.

Ces différences d'appréciations ne ternissent cependant pas la confiance que je porte à RDB, gardant son blog dans mes favoris, et le lisant régulièrement (en étant souvent peu d'accord avec lui, certes). [-_ô].

Mais laissons là ces considérations d'amateurs pointilleux et ces controverse, pour plutôt te remercier de cette belle entrée de blog.

Hasta aleykum !

Philippe Cordier a dit…

merci, mais tu ne douches guère qu'un espoir naissant :)
Je sais que la façon de faire de Waid, par exemple, me plait, donnant au duo dessinateur/scenariste un rôle depuis des années uniquement, et sans raison valable, dévolu au seul scénariste
Donc Lemire je ne connais pas mais savoir que des scénaristes cherchent une approche un peu différente me va